LIVRES AUDIO

crépuscule

philippe claudel

Aux marches de l’Empire « à cent têtes et cent corps », sommeille une province minérale et nue où le froid, le givre, les bourrasques semblent ankyloser les habitants d’une bourgade qui ne signalait jusque-là ni notoriété historique, ni intérêt géographique, si ce n’est d’être placée à la frontière « d’un pays dont la bannière se frappait d’un croissant d’or », et dont la vitalité contraste avec l’épuisement ranci du village aux passions tristes.
Un jour, le curé est découvert mort. La tête fracassée par une pierre. De quelle nature est le crime ? Qui pouvait en vouloir à ce curé d’une terre où les chrétiens et les musulmans vivaient depuis toujours en bonne entente ? Que faire, qui accuser, et qui entraver dans son action si, à partir de ce meurtre, s’ordonne toute une géométrie implacable d’actes criminels et de cruautés entre voisins ? Il y a un heureux : le Policier, Nourio, car « c’était fabuleux pour lui d’avoir une pareille affaire, dans ce lieu abandonné de toute fantaisie, de tout grain de sable, roulé dans l’ordinaire des jours ». Le voilà lancé dans d’inutiles recherches. À quoi sert de s’opposer au cours impétueux des choses ?
Dans ce vieux monde de l’Empire qui s’affaisse, « dans un sommeil épais, s’enroulait dans sa léthargie comme un escargot fainéant bâille dans sa coquille », il y a tous les personnages, en chairs et en vices, qui conviennent au déroulement de la tragédie : chacun joue à merveille sa partition. Nourio, le Policier au teint olivâtre et aux pulsions incontrôlables. Baraj, l’Adjoint dont l’apparence de bête placide et musculeuse dissimule l’âme d’un enfant poète. Lémia, la fillette aux formes adolescentes dont les ombres et les pleins agacent les nerfs du Policier. Tant d’autres, et même les fantômes des temps passés, qui n’ont en commun, dans leur médiocrité âpre et satisfaite, dans le secret de leurs âmes, que d’agir en comparses du grand Effondrement de l’Empire. De suspens en rebondissements, l’intrigue haletante se double d’une grande réflexion sur nos errements contemporains, la volonté de quelques-uns de réécrire l’Histoire, la négation de certains crimes de masse et autres arrangements avec la réalité.

le roi et l'horloger

arnaldur indridason

Un chef d’œuvre créé à la Renaissance repose en pièces détachées dans les sous sol du palais du Roi à Copenhague, on décide de confier la reconstruction de l’extraordinaire horloge astronomique à un horloger islandais taciturne et parait-il habile. Le Roi Christian VII s’ennuie et va voir la progression du travail, il questionne cet homme sur sa vie en Islande, il entend une histoire terrible dans laquelle ses représentants appliquent des lois qui pourraient le remettre lui-même en question. Une sorte d’amitié commence à se nouer entre ces hommes qui n’avaient aucune chance de se rencontrer.
Des ateliers du palais à la Cour et aux bas fonds des bordels de Copenhague nous accompagnons ces héros dérisoires et fragiles dans leur recherche tragique et vitale.

il n'y a pas de ajar

delphine horvilleur

L’étau des obsessions identitaires, des tribalismes d’exclusion et des compétitions victimaires se resserre autour de nous. Il est vissé chaque jour par tous ceux qui défendent l’idée d’un ” purement soi ” , et d’une affiliation ” authentique ” à la nation, l’ethnie ou la religion. Nous étouffons et pourtant, depuis des années, un homme détient, d’après l’auteure, une clé d’émancipation : Emile Ajar.
Cet homme n’existe pas… Il est une entourloupe littéraire, le nom que Romain Gary utilisait pour démontrer qu’on n’est pas que ce que l’on dit qu’on est, qu’il existe toujours une possibilité de se réinventer par la force de la fiction et la possibilité qu’offre le texte de se glisser dans la peau d’un autre. J’ai imaginé à partir de lui un monologue contre l’identité, un seul-en-scène qui s’en prend violemment à toutes les obsessions identitaires du moment.
Dans le texte, un homme (joué sur scène par une femme…) affirme qu’il est Abraham Ajar, le fils d’Emile, rejeton d’une entourloupe littéraire. Il demande ainsi au lecteur/spectateur qui lui rend visite dans une cave, le célèbre ” trou juif ” de La Vie devant soi : es-tu l’enfant de ta lignée ou celui des livres que tu as lus ? Es-tu sûr de l’identité que tu prétends incarner ? En s’adressant directement à un mystérieux interlocuteur, Abraham Ajar revisite l’univers de Romain Gary, mais aussi celui de la kabbale, de la Bible, de l’humour juif…

les vertueux

yasmina khadra

J’ai vécu ce que j’avais à vivre et aimé du mieux que j’ai pu. Si je n’ai pas eu de chance ou si je l’ai ratée d’un cheveu, si j’ai fauté quelque part sans faire exprès, si j’ai perdu toutes mes batailles, mes défaites ont du mérite – elles sont la preuve que je me suis battu.Algérie, 1914. Yacine Chéraga n’avait jamais quitté son douar lorsqu’il est envoyé en France se battre contre les “Boches”. De retour au pays après la guerre, d’autres aventures incroyables l’attendent. Traqué, malmené par le sort, il n’aura, pour faire face à l’adversité, que la pureté de son amour et son indéfectible humanité.Les Vertueux est un roman majeur, la plus impressionnante des oeuvres de Yasmina Khadra.

au bonheur des ogres

daniel pennac

Benjamin Malaussène a un drôle de métier : bouc émissaire au service réclamations d’un grand magasin parisien où il est chargé d’apitoyer les clients grincheux.
Une bombe, puis deux, explosent dans le magasin. Benjamin est le suspect numéro un de cette vague d’attentats aveugles. Attentats ? Aveugles ? Et s’il n’y avait que ça !
Quand on est l’aîné, il faut aussi survivre aux tribulations de sa tumultueuse famille : la douce Clara qui photographie comme elle respire, Thérèse l’extralucide, Louna l’amoureuse, Jérémy le curieux, le Petit rêveur, la maman et ses amants…
Le tout sous les yeux de Julius, le chien épileptique, et de Tante Julia, journaliste volcanique.
Quel cirque ! Avec ce premier tome des aventures de Malaussène, on plonge avec bonheur dans un univers baroque.
Pennac multiplie les personnages secondaires, les digressions. Ça grouille comme dans une fourmilière. Le rire n’est jamais loin des larmes, le sordide côtoie le sublime. Bruno Ménard

cette lumière en nous

michelle obama

Après le succès mondial de Devenir, ses mémoires salués par la critique et le public, l’ancienne première dame des États-Unis Michelle Obama partage avec nous des conseils, des histoires et des stratégies efficaces pour rester optimistes et sereins face aux grandes incertitudes du monde actuel.
Il n’y a peut-être pas de solution idéale ni de réponse concise aux grands défis de la vie, mais Michelle Obama est convaincue que chacun peut trouver des ressources sur lesquelles s’appuyer pour mieux aborder les changements et évoluer sans perdre son cap. Dans Cette lumière en nous, elle engage un dialogue franc et honnête avec ses lecteurs et se penche sur des questions que nous sommes nombreux à nous poser : comment construire des relations durables et sincères ? Comment nos différences peuvent-elles nous rendre plus forts et nous souder ? Quels outils peut-on utiliser quand on doute de soi et quand on se sent démuni ? Que faire quand on a l’impression de perdre pied ?
Michelle Obama offre à ses lecteurs des récits personnels inédits et des réflexions pertinentes sur le changement, l’adversité et le pouvoir : elle est persuadée que, si on tourne sa lumière vers les autres, on peut révéler la richesse et le potentiel du monde autour de soi, et ainsi découvrir des vérités plus profondes et ouvrir de nouvelles voies au progrès. En s’appuyant sur son expérience de mère, de fille, d’épouse, d’amie et de première dame, elle confie les secrets et les ressources qu’elle déploie pour s’adapter au changement et surmonter les obstacles. C’est cette sagesse, fruit de son expérience, qui lui permet de continuer à s’accomplir. Elle décrit ses méthodes les plus utiles, notamment “commencer par être bienveillant”, “s’élever”, ou encore suggère de réunir autour de la “table de la cuisine” mentors et amis de confiance. Avec l’humour, la sincérité et l’empathie qui la caractérisent, elle explore également des questions liées à la race, au genre et à la visibilité, incitant ses lecteurs à vaincre leurs peurs, à puiser de la force dans le collectif et à vivre avec audace.
“Quand on est capable de voir et de reconnaître sa propre lumière, alors, on trouve le courage de l’utiliser”, écrit Michelle Obama. À travers des exemples éloquents et des conseils avisés, Cette lumière en nous invite les lecteurs à réfléchir sur leur vie, à identifier ce qui leur procure de la joie et à nouer des liens enrichissants dans un monde tumultueux.

blanc

sylvain tesson

Avec mon ami le guide de haute montagne Daniel du Lac, je suis parti de Menton au bord de la Méditerranée pour traverser les Alpes à ski, jusqu’à Trieste, en passant par l’Italie, la Suisse, l’Autriche et la Slovénie. De 2018 à 2021, à la fin de l’hiver, nous nous élevions dans la neige. Le ciel était vierge, le monde sans contours, seul l’effort décomptait les jours. Je croyais m’aventurer dans la beauté, je me diluais dans une substance. Dans le Blanc tout s’annule — espoirs et regrets. Pourquoi ai-je tant aimé errer dans la pureté ?
S. T

un chien à ma table

claudie hunzinger

C’est un roman dont Yes, une jeune chienne, est le personnage principal. Un soir, celle-ci, traînant une sale histoire avec sa chaîne brisée, surgit à la porte d’un vieux couple, Sophie une romancière et Grieg son compagnon. À partir de là, le destin de Yes va tenir à lui seul la narration. D’où vient-elle, qu’a-t-elle vécu ? Est-on à sa poursuite ? La chienne se révélera la gardienne de ce qui caractérise l’humain. La gardienne du langage. Mais une gardienne menacée.
On pourrait aussi voir dans ce roman l’histoire d’un duo féminin/animal. Il raconte en effet la grande affection qui lie Sophie, la narratrice, et Yes, la jeune chienne échappée de chez un zoophile. Chacune s’augmentant de l’autre. Chacune veillant aussi sur l’autre. Jusqu’au drame.
Mais c’est également un roman d’amour entre deux êtres humains, interrogeant quelle sorte d’amour lie encore un vieux couple, Sophie qui aime les marches dans la forêt, et Grieg, déjà sorti du monde, dormant le jour et lisant la nuit, survivant grâce à la littérature. L’intrusion de Yes sera le révélateur de l’amour qui lie ce couple en passe de l’avoir oublié.
Cependant, on peut aussi penser que le thème du roman, c’est la vieillesse. Celle du monde, celle d’un couple, celle d’une femme. Oui. Mais surtout le contraire de la vieillesse. Dans ce roman, on n’accepte pas encore la défaite. Grâce à l’irruption de Yes, il est une ode à la vie.
On peut également penser qu’on se trouve dans un roman écoféministe dont l’enjeu est ce qui lie la nature menacée et le féminin révolté.
Quoi qu’il en soit, on baigne dans des temps troublés. Bizarres. Inquiétants. Où va-t-on ? L’humanité, que deviendra-t-elle ? Que deviendront les bibliothèques, les librairies, les livres ? Mais comme il s’agit d’un livre qui prône l’extravagance, où les poètes de ces temps de détresse se sont réfugiés dans les champignons, merveilles d’un futur imprévisible, ce roman baigne dans un climat d’amour de la poésie. Son véritable enjeu climatique, c’est la poésie.

l'air était tout en feu

pascal camille

27 avril 1718. Un incendie ravage le Petit-Pont, menaçant Notre-Dame. Alors qu’à Paris l’air est tout en feu, au château de Sceaux, la duchesse du Maine souffle sur un autre brasier bien plus dangereux pour le Régent, celui du complot.
Mariée à l’aîné des bâtards de Louis XIV, haute comme trois pommes mais animée de l’orgueil d’une princesse du sang, cette précieuse règne sur sa petite cour de beaux esprits comme sur son mari. Soutenue en secret par le prince de Cellamare, ambassadeur du roi d’Espagne, et encouragée par les survivants de la vieille cour du Roi-Soleil, elle va intriguer avec passion.
Ainsi, en ce printemps 1718, un vent de fronde se lève sur la France et une véritable course-poursuite pour le pouvoir s’engage entre la duchesse d’un côté et le Régent de l’autre.
À travers les méandres des conspirations politiques, les haines familiales et une galerie de portraits tous plus extravagants les uns que les autres, Camille Pascal fait renaître avec virtuosité le temps enflammé et haletant de la Régence.

robespierre

hervé leuwers

Robespierre, c’est la Révolution, son souffle épique, et son soufre aussi. L’homme est chargé de tous les maux et couvert de tous les éloges avant même son élection au Comité de salut public, en juillet 1793. Aujourd’hui, beaucoup lui associent la Terreur et les massacres de Vendée ; d’autres soulignent son combat pour le suffrage universel, sa dénonciation de la peine de mort et de l’esclavage, sa défense d’un pays menacé, son rêve d’une république qui offre à tous une égale dignité. Comment dépasser ce paradoxe ? Hervé Leuwers s’est lancé sur les traces de l’enfant d’Arras devenu mythe, en véritable historien, bousculant les présupposés, analysant des sources jusqu’à aujourd’hui inédites, creusant les archives pour faire jaillir le portrait d’un juriste et homme de lettres, d’un orateur hors pair, d’un politique intransigeant et désintéressé. Un homme d’état, certes, comme la France en a peu connu dans son histoire, mais aussi une personnalité complexe, dérangeante, et pourtant souvent généreuse. Cette biographie de référence invite à redécouvrir un homme d’exception qui fascine dans le monde entier. Professeur à l’université Lille 3, Hervé Leuwers est spécialiste de la Révolution française et de la société judiciaire des xviie et xviiie siècles. Il a notamment publié Un juriste en politique : Merlin de Douai (APU, 1996), L’Invention du barreau français (Éd. de l’EHESS, 2006, prix Limantour) et La Révolution française et l’Empire (PUF, 2011).